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Sauvegarde du Patrimoine du village de Flamarens dans le Gers

Hommage à notre président Gilbert Blanc décédé le 4 novembre 2017

Gilbert

Discours de Monsieur le Maire, Xavier Ballenghien pour ses obsèques le 8 novembre 2017, écrit pour l'essentiel par son fils Philippe

Nous sommes réunis ce jour pour accompagner Gilbert Blanc jusqu’à sa dernière demeure et pour entourer son épouse Michèle, ses enfants Philippe et Dominique, et toute sa famille en ces instants difficiles de la séparation. Les drapeaux républicains ici présents sont là pour signifier la reconnaissance de la patrie à l’ancien combattant qu’il était et les honneurs militaires lui seront rendus tout à l’heure au cimetière.

Gilbert Blanc est né le 3 juin 1932 à Flamarens au lieu-dit Maynardet, ferme familiale de ses grands-parents Pons. La famille Blanc, quant à elle, venait du Castéra-Bouzet dans le Tarn et Garonne, originaire de ce village depuis très longtemps, bien avant la Révolution française.

Tout cela pour dire que Gilbert Blanc était bien ancré dans ce terroir de Lomagne. Dans sa généalogie, on ne lui trouve aucun ancêtre venant d’une autre région. La Lomagne était sa patrie, le gascon sa langue maternelle.

En 1934, son père acheta la ferme du Mouron où Gilbert Blanc vécut jusqu’à la fin de sa vie.

Il s’en éloigna peu, il fit des études jusqu’en troisième au collège de Lectoure où il se rendait chaque semaine en vélo. C’était pendant la guerre. On voulait faire de lui un « ministre » disaient des esprits chagrins. Malgré ses capacités, il ne fit pas de longues études. A cette époque, les enfants de paysans n’en faisaient pas ; quand on était fils unique, on aidait son père et on reprenait la propriété familiale. Tel était le destin d’un enfant de paysan.

Il fit son service militaire en Allemagne à Neustadt an der Weinstrasse dont il garda un assez bon souvenir. C’était en 1952, il y resta 18 mois mais fut très content de rentrer chez lui où il dut assurer le travail dans la ferme familiale, son père étant alors malade. Mais son répit fut de courte durée car au bout de même pas deux ans il fit partie de ceux qu’on appela les « rappelés » qui allèrent défendre la présence française en Algérie.

Contraint, forcé et révolté, il fit ce voyage qui le conduisit encore loin de sa Lomagne. D’après ses dires, il y découvrit un pays qui lui parut bien plus développé que le sien, une agriculture au top niveau qu’il admirait. Une vision peut-être éloignée de la vérité officielle d’aujourd’hui mais c’était sa vision à lui.

Ce fût surtout pour lui le voyage de sa vie puisqu’il y trouva l’amour en la personne de Michèle qui n’hésita pas à l’âge de 18 ans à quitter parents, famille, aisance sociale pour le suivre sur cette terre lomagnole. Cette année en 2017, ils atteignirent 60 ans de mariage mais qu’ils ne purent malheureusement pas fêter, son état de santé étant déjà bien dégradé. 

Son métier d’agriculteur

Gilbert aimait sa terre natale, la Lomagne et il aimait la cultiver.

En Algérie, en 1956, il découvrit des méthodes modernes de culture en particulier en utilisant des engins mécanisés. Il s’en inspira, une fois démobilisé et marié. Il commença par l’achat d’une moissonneuse-batteuse, sur une idée de son beau-père, prématurément disparu. L’achat de cette moissonneuse lui permit de lancer une entreprise de travaux agricoles génératrice de revenus qui ensuite lui permirent d’agrandir sa propriété agricole.

Jusqu’à la fin de sa vie, il eut la joie de voir Dominique travailler ses terres agricoles. Et samedi encore, juste avant sa mort, il eut plaisir à apprendre qu’elle avait terminé les semis d’automne.

Les amis de Flamarens

Gilbert aimait la Lomagne, et il aimait se cultiver et s’engager pour que vive le patrimoine et les traditions. Il s’intéressa beaucoup à l’histoire de l’église Saint Saturnin et écrivit même un livre, véritable travail d’historien auquel il consacra ses jours et ses nuits sans en attendre récompense ou gloire. Il éprouvait simplement fierté et bonheur d’avoir contribué à transmettre, pour Flamarens et pour la Lomagne, les traces du passé en les rassemblant dans cet ouvrage publié par l’association « La Lomagne, Mémoire pour demain ».

En 1976 il s’engagea dans l’association « Les amis de Flamarens ». Très vite, il en fut le président.  Nettoyer le village des ronces et des ruines qui l’encombraient alors, participer activement  aux travaux de restauration de l’église et du château, faire des expositions, mettre en place l’écomusée de la Lomagne, participer à la ronde des crèches, organiser des manifestations dans le but de restaurer l’église furent au cœur de cet engagement. Toujours prêt à mettre ses immenses compétences manuelles et intellectuelles au service de l’association ou des personnes qui le lui demandaient. Car il savait tout faire, tout réparer. De la menuiserie à la ferronnerie, rien ne l’arrêtait.

En famille aussi ses compétences étaient appréciées. Il suffisait à ses enfants et petits enfants de demander et tout problème était résolu : un pneu à changer, un arbre à couper, une fuite d’eau à réparer, du béton à faire, une cabane d’enfant à monter, des meubles sur mesures pour ses enfants et petits-enfants. Son départ laisse un grand vide qui sera difficile à combler.

Mais Gilbert ne s’intéressait pas simplement aux choses du passé. Il s’intéressait à toutes les technologies nouvelles en particulier Internet qu’il utilisait avec facilité. Il avait même créé un site internet pour faire connaitre «  les amis de Flamarens », et ce site lui survivra.

Le gascon, sa langue maternelle

Gilbert Blanc ne parlait pas le français quand il était enfant. Sa langue, c’était le gascon qui était appelé à tort le patois par ceux-là même qui firent tout pour sa disparition. Gilbert Blanc, conditionné par le discours dominant selon lequel seul le français était digne d’être étudié, transmis et écrit ne chercha pas à transmettre à ses enfants sa langue natale. Ils le regrettent.

Des mots qu’ils affectionnaient comme ripoupet, lo tros (lou trous), la canha (la cagno), lo gat (lou gat) ou des expressions comme balha vin (baïo bin), vai t’en (baï tén), la hemna (la henno) vont bien leur manquer. Jamais plus personne ne leur dira.

Conclusion

Aujourd’hui, la commune de Flamarens perd un homme de grande valeur. Véritable paysan et véritable  internaute, à la fois historien et précurseur, manuel et intellectuel autodidacte, homme de Lomagne, au caractère rugueux comme la terre qu’il cultivait et, comme elle, tellement généreux dans ses œuvres !

A vous, Michèle, Dominique et Philippe, à tous les membres de votre famille, la commune présente ses plus sincères condoléances  et vous assure de son soutien en ces moments difficiles.

A vous Gilbert, la commune redit aujourd’hui par ma voix sa profonde reconnaissance pour tout ce que vous lui avez légué, pour votre immense contribution à la sauvegarde de son patrimoine architectural, linguistique et historique, matériel et immatériel. Où que vous soyez maintenant, puissiez-vous avoir trouvé réponse à toutes les questions historiques, philosophiques et spirituelles qui aiguisaient votre curiosité intellectuelle et aiguillonnaient votre action.  Adishatz Gilbert !

 

Date de dernière mise à jour : mercredi, 07 mars 2018

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